DOSSIER – Eléments de constitution d’un budget

Dans le dossier « UN BUDGET, POUR QUOI FAIRE ? » nous avons vu la nécessité des outils de prévisions, et les différentes composantes d’un budget. Dans la suite logique de cette démarche, il nous faut analyser :
– Le budget d’investissement
– Le budget de trésorerie
– Le compte de résultat prévisionnel
– Le tableau de financement

Après cela, vous disposerez d’un outil complet qui vous permettra de piloter votre projet ou votre entreprise dans de bonnes conditions, et de défendre votre démarche devant votre conseil d’administration, vos partenaires financiers, ou, tout simplement, dans le bureau de votre associé.

Le budget d’investissement

C’est une composante simple, et, pour cette raison, souvent oubliée ou négligée.
Les investissements peuvent aller de l’achat de matériel de bureau jusqu’à l’acquisition d’un nouveau siège social; en fonction des principes comptables, toute acquisition d’un bien destiné à figurer à l’actif du bilan et dont la valeur dépasse 2 500 Francs doit figurer sur le budget d’investissement.


Sous forme de tableau, vous allez lister tous les achats prévus en indiquant, pour chacun d’entre eux ( ou pour chaque catégorie ) la valeur d’achat, la date d’acquisition projetée et la durée d’amortissement prévue, ainsi que son mode, linéaire ou dégressif, et le montant de la dotation pour l’exercice.
Il faut ici, bien sûr, anticiper sur des décisions stratégiques et appliquer les règles comptables; notre propos ne consiste pas à les approfondir ici.
Pour nos exemples, nous retiendrons donc une hypothèse simple, celle de l’amortissement linéaire.
Vous prévoyez d’acquérir, au cours du prochain exercice, du mobilier de bureau à hauteur de 60 000 Francs et un équipement informatique (hardware) pour le prix de 120 000 Francs; le premier achat est programmé en avril, le second en juillet.
Vous devez maintenant choisir la durée d’amortissement.
Elle doit être cohérente par rapport à la durée d’utilisation normale du bien; à ce propos, l’administration fiscale publie des durées indicatives auxquelles il est toujours possible de se référer.
Dans l’exemple choisi, on peut estimer qu’une durée de 5 ans est raisonnable pour le mobilier de bureau.
Concernant le matériel informatique, très concerné par l’obsolescence, le choix d’une durée de 3 ans conviendra mieux.
L’amortissement annuel sera par conséquent de 10 000 Francs pour le premier investissement, de 40 000 Francs pour le second.
Il faut savoir que le plan d’amortissement doit, pour la première annuité, être établi prorata temporis, c’est à dire en fonction de la date de mise en service du bien.
Un bien est réputé mis en service à compter du premier jour du mois au cours duquel il entre dans l’entreprise; ici le mobilier de bureau étant livré en avril, la dotation sera égale à 9/12 de l’amortissement annuel, soit 9 000 Francs.
L’informatique, quant à lui, sera reputé mis en service le premier juillet et la dotation de l’exercice sera égale à 20 000 Francs.
Rien de bien compliqué, en somme.

Le budget de trésorerie

Nous abordons là un chapitre très important et sensiblement plus complexe.
Dans le principe, il s’agit seulement d’enregistrer, mois par mois dans le cas général ( dans les cas difficiles comme le redressement d’entreprise, par exemple, il faut descendre à la décade, voire à la semaine ) les entrées et sorties d’argent.
Pas bien sorcier, direz-vous !
Méfiance…D’autant que si on se trompe trop sur ce point, il ne reste plus qu’à aller pleurer chez son banquier ( jamais très performant ! ) ou à cesser ses paiements.
L’enjeu justifie à lui seul la complexité de ce travail et le soin que l’on doit lui accorder.
Quels sont les éléments qui vont entrer dans la prévision, tout d’abord ?
Bien sûr, toutes les dépenses et toutes les recettes de l’exploitation.
En deuxième lieu, les investissements.
Puisque nous venons d’en parler, précisons tout de suite que cette fois nous retiendrons la dépense globale, évidemment pas la seule dotation aux amortissements.
Troisième point…
Bien sûr il existe un troisième point, à moins que vous ne soyez en phase de création d’entreprise ! Nous parlons de prévisions, donc du futur, mais il serait trop bête d’oublier le passé pour cet exercice.
Il faudra donc intégrer tous les engagements antérieurs : les engagements donnés, comme les engagements reçus.
Citons pêle-mêle quelques exemples :
1) le remboursement des emprunts
2) le paiement des factures fournisseurs non échues
3) l’encaissement des factures clients non échues

Autre aspect capital ! Il faut ajouter à notre raisonnement la notion de délais.

Je reviens à notre achat d’informatique, prévu en juillet; si dans la négociation ou dans les relations habituelles avec le fournisseur retenu figure un délai de réglement de 60 jours, c’est dans la colonne septembre et non dans la colonne juillet que figurera la sortie d’argent.
De même en ce qui concerne les ventes et les achats; puisque votre entreprise existe déjà, vous savez que vos clients vous payent en moyenne à 90 jours et que vous réglez vos fournisseurs à 60 jours.
Eh bien, il va falloir reporter ces délais moyens aux prévisions du budget, ce qui fait que les ventes facturées en décembre 2001 alimenteront la trésorerie de 2002.
Les situations particulières comme l’URSSAF, par exemple, devront être traitées cas par cas.
Il me reste à vous rappeler que cette fois-ci nous devons raisonner en TTC; autrement dit, le budget de trésorerie doit comporter les opérations relatives à la TVA, c’est à dire le solde entre la TVA collectée et la TVA déductible.
Sans oublier, là non plus, les « engagements antérieurs » comme la TVA restant à payer ou bien le crédit de TVA à reporter.
Toutes les opérations assujetties à la TVA figurent dans ce budget pour leur montant TTC.
Ci-dessous, vous trouverez un exemple, ultra simplifié, de ce à quoi pourrait ressembler votre budget de trésorerie.
Evidemment, lorsque j’écris « charges du mois », je vous recommande d’être largement plus exhaustif !!! Il en va de même pour les autres rubriques.

 

Arrêtons-nous un instant sur la ligne « SOLDE DU MOIS »; elle ne prend pas en compte votre avoir à la fin 2001, de même qu’à partir de février, elle ne reprend pas votre solde de fin janvier, qu’il soit positif ou négatif.
Cette ligne correspond à un des objectifs majeurs du budget de trésorerie qui sert à mettre en évidence les éventuels « décalages momentanés de trésorerie ».

cf tableau « Budget de trésorerie 2002 »

Lorsque nous aborderons le tableau de financement, nous verrons qu’il faut couvrir, selon l’orthodoxie financière, les investissements ( les immobilisations, donc ) et le besoin en fonds de roulement.
Ceci dit, le besoin en fonds de roulement, de même que la capacité d’autofinancement que nous évoquerons au prochain chapitre, est appréhendé de façon globale, c’est à dire qu’il correspond à une moyenne annuelle.
Les notions de délais que le budget de trésorerie permet de mettre en évidence donnent un éclairage supplémentaire sur les besoins de financement; il n’y là aucune charge nouvelle*, mais il est plus que fréquent que, les recettes variant selon une saisonnalité propre à chaque entreprise, les nécessités de la négociation commerciale poussant à admettre que les clients payent moins vite que les fournisseurs, il y a matière à un nouveau financement que les banquiers admettent bien : celui des décalages de trésorerie.
Ceci n’est pas un point secondaire, car même avec un bon budget d’exploitation, il n’est pas très agréable de se retrouver en rouge à la banque; ça peut même être dangereux !

* Toutefois, si vous prévoyez des décalages, il faudra solliciter des concours bancaires et ceux-ci ne sont pas gratuits ( à prévoir dans le budget d’exploitation et dans le budget de trésorerie à la rubrique  » Frais financiers » )

Le compte de résultat prévisionnel

Vous pouvez affiner votre budget d’exploitation puisqu’aux données de base, vous êtes désormais en mesure d’ajouter les dotations aux amortissements ( provenant du budget d’investissement et révélées au titre des engagements antérieurs pour les immobilisations déjà en cours d’amortissement ); vos décalages momentanés de trésorerie sont identifiés et vous êtes en mesure d’évaluer ce qu’il vont vous coûter en termes de frais financiers.
Nous approchons !
Le compte de résultat prévisionnel va vous permettre de chiffrer un dernier élément qui sera fort utile dans la préparation de votre tableau de financement : la capacité d’autofinancement de l’exercice.
Globalement, elle correspond au résultat net de l’exercice augmenté du montant des amortissements et des provisions de l’exercice, qui, rappelez-vous, ne constituent pas des charges financières; bien sûr il sera trop tôt pour apprécier le montant des provisions.
Soit vous tenez à en tenir compte et vous évaluez, sur la base des années antérieures, un forfait concernant les clients et les stocks; soit vous passez ce point sous silence, et vous n’en serez que plus prudent car, procédant ainsi vous minorez votre CAF.
Il vous faut utiliser le tableau des soldes intermédiaires de gestion, ce qui est une excellente présentation et qui sert souvent d’outil d’analyse aux partenaires financiers.
Si vous ne connaissez pas ce tableau, vous pouvez faire simple en ne retenant que ces quelques lignes :

+ Ventes de marchandises
+ Production vendue
– Achats de marchandises
– Achats de matières premières
– Autres achats et charges externes
– Impôts et taxes
– Charges de personnel
– Dotations aux amortissements et provisions
– Charges financières
+ Produits financiers
– Participation des salariés
– Impôts sur les sociétés

RESULTAT NET

La capacité d’autofinancement de l’exercice sera égale à « Bénéfice Net + Dotations aux amortissements et provisions « ; à ne pas confondre avec l’autofinancement, car si les actionnaires décident le versement de dividendes, la CAF nette sera égale à CAF – Distribution.

Le tableau de financement

Nous allons raisonner à partir de deux notions qui vous sont peut-être familières si vous avez l’habitude de travailler avec des bilans : les ressources et les emplois.
Retenons quelques hypothèses :
a) l’entreprise a déjà clos plusieurs exercices et dispose de bilans
b) le résultat net prévu est de 200 KF
c) les amortissements s’élèvent à 70 KF
d) aucune distribution n’est prévue, les associés s’y sont engagés
e) les comptes clients seront en fin d’exercice de 600 K
f) les comptes fournisseurs s’élèveront à 400 KF
g) les stocks seront de 100 KF
h) l’entreprise devra rembourser 100 KF au titre des emprunts en cours
i) son budget de trésorerie montre qu’il manquera 50 KF à la fin
de 3 mois différents
h) le montant des investissements prévus est de 180 KF.

Nous disposons de tous les éléments nécessaires pour travailler sur le tableau de financement.
Pour connaître le point de départ, il convient de prendre en mains le bilan du dernier exercice et de comparer le montant des Immobilisations nettes ( amortissement déduit ) à celui des capitaux permanents ( capitaux propres + dettes à + d’un an); afin de ne pas compliquer inutilement notre réflexion, disons que CP ( capitaux permanents ) = 1 MF et que les immobilisations nettes égalent 700 KF; nous avons donc un fonds de roulement positif de 1000 – 700 = 300 KF.
Le besoin en fonds de roulement ( stocks + clients – fournisseurs ) est fondé sur des chiffres identiques à ceux que nous prévoyons pour l’année à venir soit (100 + 600 – 400 ) = 300.
Fonds de roulement – Besoin en fonds de roulement = 0.
La situation de trésorerie est équilibrée, ni déficitaire, ni excédentaire : nous n’avons plus à nous en soucier.
Quelles vont être nos ressources ? Et nos besoins (ou emplois) ?

cf « Tableau de financement 2002 »

Mieux qu’un long discours, l’illustration vous montre que le tableau est à peine équilibré, grâce à un associé qui accepte de déposer 10 KF en compte courant.
Et encore, dans notre cas, le BRF ne varie-t-il pas, donc le volume d’activité reste stagnant ou l’on a pris des décisions drastiques quand au crédit clients, aux délais de réglement des fournisseurs et au niveau des stocks; admettons-le, mais c’est a priori volontariste, risqué, peut-être…
Il est possible, évidemment, de réfléchir à des variantes.
En pareil cas, pourquoi payer cash les investissements plutôt que de demander un nouveau prêt à la banque à laquelle vous avez bien remarqué que nous allons rembourser 100 000 Francs ?
Le financement de l’exercice aurait bien meilleure allure, on pourrait éviter de demander la facilité de caisse et de solliciter l’associé.

En ce qui concerne la facilité de caisse, certains diront qu’il serait possible d’escompter des effets, ou de faire appel à un factor.

C’est vrai ! Mais il est ne faut pas perdre de vue que ceci reste lié à un accord bancaire et n’apporte aucune disponibilité nouvelle : le seul effet consiste à fluidifier ou à rendre liquide une partie du compte client…tout en entraînant des charges financières non négligeables.
Après tout ça n’est pas bien grave lorsqu’il s’agit seulement de traiter autrement ce qui aurait pu être une autorisation ( écrite ) de découvert.
Hélas, cela devient parfois une pratique dangereuse, quand le dirigeant s’imagine améliorer de cette manière son fonds de roulement !
Au mieux cela peut combler une partie du besoin en fonds de roulement.
Personnellement, je ne suis pas d’accord avec les auteurs qui encouragent directement ou indirectement cette pratique; lorsqu’elle devient endémique, on se trouve en face d’un artifice qui permet, certes, à l’entreprise de fonctionner, mais en lui dissimulant qu’elle souffre d’une insuffisance structurelle de trésorerie, jusqu’au jour où, la croissance aidant, elle est à nouveau dans l’impasse, ne serait-ce que parce que ses banquiers refusent d’augmenter le « plafond » d’escompte.
Que voulez-vous ? Ils n’aiment pas beaucoup prendre des risques et risquent de vous dire, non sans raison, que si vous n’avez pas assez confiance en votre entreprise pour la doter du capital suffisant, ils n’ont aucune raison de vous faire confiance, à leur tour.

Notre tour d’horizon s’achève…
Puisque nous entrons dans la période des budgets, il me reste à vous souhaiter un bon travail.
Et comme rien n’est jamais exhaustif, j’accueillerai avec plaisir vos questions si vous souhaitez détailler un ou plusieurs points.

Arrêtons-nous un instant sur la ligne « SOLDE DU MOIS »; elle ne prend pas en compte votre avoir à la fin 2001, de même qu’à partir de février, elle ne reprend pas votre solde de fin janvier, qu’il soit positif ou négatif.
Cette ligne correspond à un des objectifs majeurs du budget de trésorerie qui sert à mettre en évidence les éventuels « décalages momentanés de trésorerie ».

Lorsque nous aborderons le tableau de financement, nous verrons qu’il faut couvrir, selon l’orthodoxie financière, les investissements ( les immobilisations, donc ) et le besoin en fonds de roulement.
Ceci dit, le besoin en fonds de roulement, de même que la capacité d’autofinancement que nous évoquerons au prochain chapitre, est appréhendé de façon globale, c’est à dire qu’il correspond à une moyenne annuelle.
Les notions de délais que le budget de trésorerie permet de mettre en évidence donnent un éclairage supplémentaire sur les besoins de financement; il n’y là aucune charge nouvelle*, mais il est plus que fréquent que, les recettes variant selon une saisonnalité propre à chaque entreprise, les nécessités de la négociation commerciale poussant à admettre que les clients payent moins vite que les fournisseurs, il y a matière à un nouveau financement que les banquiers admettent bien : celui des décalages de trésorerie.
Ceci n’est pas un point secondaire, car même avec un bon budget d’exploitation, il n’est pas très agréable de se retrouver en rouge à la banque; ça peut même être dangereux !

* Toutefois, si vous prévoyez des décalages, il faudra solliciter des concours bancaires et ceux-ci ne sont pas gratuits ( à prévoir dans le budget d’exploitation et dans le budget de trésorerie à la rubrique  » Frais financiers » )

Notre tour d’horizon s’achève…
Puisque nous entrons dans la période des budgets, il me reste à vous souhaiter un bon travail.
Et comme rien n’est jamais exhaustif, j’accueillerai avec plaisir vos questions si vous souhaitez détailler un point.